Depuis la mort de Clément Méric, la présidente du FN ne cesse de le répéter : son parti n'a aucun lien avec le groupuscule d'extrême droite. Vraiment ?

"Je ne connais pas précisément ce groupe", a affirmé Marine Le Pen. (Photomontage/AFP)
"Je ne connais pas précisément ce groupe", a affirmé Marine Le Pen. (Photomontage/AFP)

Marine Le Pen et ses acolytes ont-il la mémoire qui flanche ? Depuis la mort de Clément Méric sous les coups de skinheads gravitant autour des Jeunesses nationalistes révolutionnaires (JNR), la présidente du FN affirme que son parti n'a "aucun rapport" avec ce groupuscule d'extrême droite. "Je ne connais pas précisément ce groupe", va-t-elle jusqu'à déclarer, dimanche sur BFMTV. "Je ne savais même pas que ça existait !", renchérit le vice-président du Front national Florian Philippot sur RMC, "j'en ai appris l'existence par la presse".


Et pourtant. Comme le rappellent "Les Inrockuptibles", Serge Ayoub, dit "Batskin", chef des Jeunesses nationalistes révolutionnaires, a dîné avec Marine Le Pen à Paris en août 2010 alors que cette dernière était en campagne interne contre Bruno Gollnisch. Une information initialement révélée par le livre des journalistes du "Monde" Caroline Monnot et Abel Mestre, "Le système Le Pen", paru en 2011 aux éditions Denoël, et qu'elle n'avait alors pas démentie.
"Elle me posait des questions. Elle cherchait à comprendre pourquoi certains groupuscules de l'extrême droite radicale lui étaient hostiles et pourquoi je la soutenais", explique à l'hebdomadaire le chef de bande de la mouvance skinhead. La patronne du Front l'aurait trouvé plus "modéré" qu'escompté. Dimanche, Marine Le Pen a confirmé avoir "rencontré une fois" Serge Ayoub : "J'en ai conclu que nous n'avions pas grand-chose à nous dire et rien à faire ensemble", avait-elle lancé. Fermez le ban.

Un verre au QG des JNR

A ce dîner, il faut pourtant ajouter un verre pris par Marine Le Pen au Local, le bar associatif de Serge Ayoub, à l'occasion de la première "100% French Pride" organisée par le site FDesouche.com en 2008. Pour preuve, le Petit Journal de Canal + pointe le papier-peint qui figure sur une photographie prise lors d'un reportage de Rue89 (à gauche). Cette même tapisserie qui apparaît dans une interview vidéo du chef des JNR officiellement réalisée dans son bar (à droite).

En campagne pour Marine Le Pen ?

Bien avant, en 1995, Serge Ayoub avait également été sollicité par le Front national pour être tête de liste aux élections municipales à Stains (Seine-Saint-Denis), selon ses dires. Une entreprise qui ne s'était finalement pas concrétisée. 
Dimanche, Jean-Luc Mélenchon a quant à lui évoqué un épisode plus récent, datant de juin 2012 : "Je suis témoin personnellement du fait que M. Ayoub était présent sur les marchés d'Hénin-Beaumont dans une circonscription où son mouvement n'avait pas de candidat et il était là, en soutien de Mme Le Pen", déclarait-il dimanche. Une version corroborée par "Marianne", pour qui Ayoub faisait bel et bien campagne pour Marine Le Pen sur le marché d'Hénin-Beaumont.

Des prestations pour le FN

Autre indice de la proximité entre le FN et les JNR avancé par le Petit Journal, la présence d'un homme, clairement reconnaissable grâce à son tatouage, à une manifestation des Jeunesses nationalistes révolutionnaires (à gauche) ainsi qu'à la grand-messe FN du 1er mai 2013 à Paris (à droite). Les JNR seraient donc acceptées aux manifestations du Front national, quand bien même Marine Le Pen affirmait en avril 2011 qu'elle ne voulait "plus voir de skinhead dans les défilés du FN".

Mais il y a plus encore. Dans ces photos publiées par le site REFLEXes, un des membres des JNR, Daniel Mack, assure le service d'ordre rapproché des leaders du FN au défilé du 1er mai 2012 (à gauche et en bas, avec les lunettes noires et le badge du "Département protection sécurité" du Front national). Un homme que l'on retrouve (à droite) à un rassemblement des Jeunesses nationalistes révolutionnaires.


Cet échange de bons services ne daterait pas d'hier, à en croire REFLEXes : "Entre 1992 et 1994, il n'est pas rare de voir les JNR, parfois aux côtés du GUD dirigé par Frédéric Chatillon, faire le service d'ordre volant autour des meetings du Front national, comme au meeting du Zénith à Paris en 1992", lit-on sur le site. Depuis, l'opération de dédiabolisation imposée par Marine Le Pen n'a donc pas suffi à faire disparaître ces troubles relations.