Chaque année, le 26 juillet, les socialistes montluçonnais se retrouvent devant la stèle de Marx Dormoy pour commémorer son assassinat par les fascistes.
Marx Dormoy est l'exemple, pour nous socialistes qui sommes ses héritiers, mais également pour tous les progressistes et tous les républicains, d'un homme qui a consacré toute sa vie à la politique, dans le sens le plus noble de la lutte pour le progrès social et l'émancipation de l'homme, en restant constamment fidèle à ses valeurs jusqu'au sacrifice de sa vie.
Je voudrais d’abord évoquer la mémoire de George LACOTE, récemment décédé. George était le Président fondateur de l’association des amis de Marx Dormoy. C’est en continuant de faire vivre cette association – et des initiatives seront prises à cet effet en septembre- que nous lui rendrons le meilleur hommage. Je lui dédie néanmoins cette cérémonie.
"Je suis socialiste, car je crois que le socialisme affranchira l'humanité des servitudes qui pèsent sur elle. C'est mon idéal. Je tiens également compte du réel. J'ai donc la conviction que les améliorations locales qui embellissent notre ville tendent à relever les conditions matérielles et le niveau intellectuel et moral des classes laborieuses " disait Marx Dormoy.
L'HOMME : nous sommes réunis pour célébrer ses idées, son action, son courage dans tous les combats qu'il a mené au service de valeurs fortes, valeurs socialistes, valeurs humanistes, valeurs républicaines …
J'évoquerai successivement le militant socialiste, l'Homme d'Etat et le Maire de Montluçon, trois facettes de son action, toujours marquée par une action réformatrice forte, un combat infatigable au service des luttes sociales et des classes populaires, une fidélité permanente aux valeurs socialistes et républicaines, à la lutte contre le fascisme. Il est mort pour ses idées.
Chaque année nous rappelons ce qu'il a été, ce qu'il a fait et en quoi nous nous sentons en filiation
avec celui que nous considérons comme le plus illustre des montluçonnais.
LE MILITANT SOCIALISTE : "les socialistes sont respectueux de toutes les opinions. Nous détestons le sectarisme, sous quelque forme qu'il se présente ".
Marx Dormoy est l'homme de la liberté, du refus de la fatalité.
Nous retenons de lui son courage et sa clairvoyance: à l'heure des grands choix, il a toujours su faire preuve d'un esprit visionnaire.
D'abord au Congrès de Tours, en 1920, en s'opposant avec force aux conditions imposées par Lénine et en refusant l'entrée dans la troisième internationale. "le socialisme démocratique est le plus grand et le plus bel idéal de solidarité, et le seul moyen pratique de faire germer le bonheur dans les sociétés humaines "
Ensuite face à la montée du fascisme et du national-socialisme, en se montrant sans complaisance à l'égard des régimes totalitaires.
Et surtout, le 10 juillet 1940, quant la République est enterrée, il fait partie des 80 parlementaires qui sauvent l'honneur en s'opposant au vote des pleins pouvoirs à Pétain.
L'HOMME D'ETAT :
Au sein du Gouvernement, Marx Dormoy, Secrétaire d'Etat à la Présidence du Conseil, se trouve être le plus proche collaborateur de Léon Blum, et sera étroitement associé aux accords Matignon.
Le 17 novembre 1936, Roger Salengro se suicide, miné par les campagnes de calomnies menées par l'extrême-droite. Marx Dormoy est nommé Ministre de l'Intérieur.
On connaît d'avantage son action à ce poste, et sa lutte permanente contre les fascistes et en particulier contre la Cagoule, avec la révocation de Doriot, maire fasciste de Saint-Denis.
Ecoutons Léon Blum: "la menace d'un putsch fasciste était réelle : il eut l'audace de pousser à fond la lutte contre la Cagoule. C'est par l'effort tenace de sa volonté que les fils du complot furent débrouillés, que les dépôts d'armes furent en partie découverts, qu'un certain nombre de chefs fut identifié. La Cagoule s'est vengée en tuant Dormoy ".
La spirale infernale de 1939-1941 va se déchaîner : la défaite et l'invasion allemande, le vote des pleins pouvoirs à Pétain avec le refus des 80 parlementaires conduits par Léon Blum et Marx Dormoy, premier acte de résistance à l'Etat de Vichy, puis la dissolution du Conseil Municipal et la révocation de Dormoy en septembre 1940, et enfin le lâche assassinat perpétré par les fascistes en cette nuit du 25 au 26 juillet 1941.
MARX DORMOY MAIRE DE MONTLUCON :
C'est le 9 mai 1926 qu'il succède à Paul Constans, et dès son discours d'ouverture, il met en avant sa volonté de rassembler tous les montluçonnais, et s'inscrit dans la continuité de ses prédécesseurs socialistes: "ensemble, nous travaillerons ainsi à l'avènement de cette république idéale fondée sur l'harmonie sociale et la justice entre les hommes ".
Toutes les réalisations le seront au service des habitants, avec une politique sociale audacieuse et en avance sur son temps, tout en maintenant une gestion saine et équilibrée des finances de la Ville. Aménageur soucieux des besoins collectifs et en particulier des plus démunis, telle était sa démarche, pour faire de Montluçon une ville moderne à l'échelle humaine.
Chacun connaît les grands axes de l'action de la municipalité menée par Marx Dormoy :
1. L'hygiène et la salubrité, à une époque où la tuberculose fait des ravages et où la mortalité infantile est affolante, en particulier dans les quartiers les plus populaires. Des travaux importants d'assainissement seront réalisés, l'accès à l'eau courante généralisé, des jardins publics créés ("pas d'hygiène sans soleil, sans lumière, sans eau et sans jardins ").
2. La santé, par la restructuration et la modernisation de l'Hôpital. Il fit en sorte que ce lieu soit fondé sur le principe de la solidarité républicaine. " Jusque là, l'Hôpital était la maison où les pauvres et les indigents étaient reçus avec une sorte d'humiliation charitable. Désormais, c'est un espace de vie où l'on a pas à rougir d'y pénétrer ".
3. L'éducation et la culture, avec la construction de nombreuses écoles.
4. Le développement des moyens de communication avec en particulier la création d'une société
d'autobus.
6. La justice sociale, par l'attribution d'aides et de bourses. Allocation aux personnes privées de ressources, création d'une caisse de chômage municipale, organisation de chantiers communaux pour donner du travail aux chômeurs … tels furent les outils que Marx Dormoy mit en place pour lutter contre la précarité. " L'ouvrier n'est pas la cause du chômage " répétait-il.
7. Le logement social, avec la volonté permanente d'améliorer les conditions de vie des plus modestes, tant pour la qualité de l'habitat que pour les coûts des loyers et des charges.
Marx Dormoy mena en parallèle une politique originale et audacieuse pour pallier à l'augmentation du coût de la vie, en luttant contre la spéculation sur les produits alimentaires de première nécessité.
DES RACINES FORTES : parce que toute démarche progressiste doit analyser le passé pour tendre vers l'avenir, nous tenons à cette date du 26 juillet pour nous livrer à ce devoir de mémoire, à cette immersion dans nos racines et nos valeurs fondamentales. Ce n’est pas faire acte de nostalgie.
Face à une crise économique, sociale, politique et morale qui efface tous les repères et met en péril les fondements de notre démocratie.
Face à un système qui entretient l’impunité envers les puissants, il nous appartient de poursuivre son combat et de se référer aux principes qui guidèrent son action.
Nous continuons à perpétuer la mémoire de l'Homme d'Etat, du bâtisseur, du grand socialiste et du grand Maire qu'a été Marx Dormoy, pour faire vivre les valeurs de solidarité, de fraternité, de tolérance chères aux montluçonnais.