Commençons par la mauvaise nouvelle, portée lundi 9 août par le commissariat général au développement durable du ministère de l'écologie : les rejets de CO2 dans l'Hexagone - incluant les secteurs primaire, secondaire et tertiaire ainsi que les ménages - se sont élevés à 439 millions de tonnes en 2007 (date des données complètes les plus récentes). Soit une tonne de plus qu'en 1990. Un résultat assez éloigné des cocoricos du gouvernement, même s'il est conforme à l'engagement de Paris, dans le cadre du protocole de Kyoto, de maintenir ses rejets de CO2 au niveau de 1990 d'ici à 2012.
Pire, "l'empreinte carbone de la demande finale française, une fois pris en compte le solde des émissions liées aux importations et aux exportations, est de l'ordre de 9 tonnes de CO2 par personne et par an", soit 545 millions de tonnes au total, 33 % de plus que le chiffre officiel, révèle l'étude, qui calculait pour la première fois ce volume d'émissions "nettes".
Ce niveau élevé interroge sur la capacité de la France à atteindre ses engagements à plus long terme : réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020 par rapport à 1990, et les diviser par quatre en 2050. Car si les rejets de CO2 n'ont pas baissé en dix-sept ans, ce n'est pas faute d'efforts.
"Le progrès technique a entraîné une baisse du niveau d'émissions unitaires de CO2 de la production et de la consommation, notent les auteurs. Cependant, l'augmentation du niveau de la production et de la consommation a de façon générale compensé les effets de cette baisse."
C'est ce qu'on appelle l'"effet rebond" : l'utilisation plus efficace d'une énergie moins émettrice de CO2 a été annulée par l'explosion de la demande. Ainsi les ménages, responsables de 30 % des émissions, ont allongé leurs parcours en voiture et agrandi la surface de leurs logements. Et dans les branches de production, la croissance a laissé au même niveau des rejets que les progrès énergétiques auraient dû faire chuter d'un tiers.
"Il ne faut pas s'arrêter à l'absence de résultats immédiats", relativise Michèle Pappalardo, la commissaire générale au développement durable. "Jusqu'en 2000, la sobriété énergétique n'était pas un sujet de préoccupation et ne faisait pas l'objet d'efforts particuliers. Depuis, les politiques en faveur des énergies renouvelables ou de l'efficacité énergétique existent, mais prennent du temps à mettre en place."
Loin de la caricature de cheminées d'usines déversant leur CO2 dans l'atmosphère, la revue de détail révèle que les émissions de l'industrie manufacturière et de la production d'énergie ont reculé de 20 millions de tonnes sur la période, quand celles des activités de commerce et de services ont bondi de 19 millions de tonnes.
La France pourra-t-elle passer à la vitesse supérieure ? Oui, dit la commissaire générale, "à condition de fixer un prix au carbone et d'accomplir des progrès importants, y compris dans nos modes de comportement individuels, pour réduire la consommation par tête d'énergie et de ressources".
Cet optimisme est confirmé - c'est la bonne nouvelle - par une étude en provenance du Canada, selon laquelle la France a pris la tête de la course vers une économie "verte". Désireux de mesurer la compétitivité de leur pays dans une économie sobre en carbone, les experts de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, assistés par le cabinet Deloitte & Touche, ont jugé les pays du G8 selon quinze indicateurs liés aux réductions des émissions (intensité carbone de l'économie, investissements, innovations, formation, institutions...). Le Canada, qui a vu ses émissions de gaz à effet de serre gonfler de 26 % entre 1990 et 2007, pointe à la sixième place.
C'est la deuxième fois en 2010 qu'une étude nord-américaine souligne les bonnes performances de la France. En mai, un palmarès réalisé par les universités Yale et Columbia, aux Etats-Unis, plaçait la France au 7e rang mondial pour l'environnement - et en tête des pays du G20.
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