Lors de la convention du parti, la majorité s'est livrée à une attaque en règles du programme socialiste. Jusqu'à travestir la réalité des chiffres.
Avalanches de Pinocchios à l'UMP. A l'occasion de sa convention, mardi 18 octobre, la majorité a redessiné et largement surestimé le coût du projet PS, annonçant sa stratégie pour la campagne présidentielle : plus c'est gros, plus ça passe.
255 milliards d'euros de dépenses publiques supplémentaires sur cinq ans. Voilà à combien grimperait la facture socialiste si l'on en croit le parti présidentiel. Comment parvient-il à un tel résultat ?
Tout d'abord en additionnant des choux et des carottes. Par exemple le financement des "300.000 emplois d'avenir" proposés par Martine Aubry, inclus dans le projet socialiste, et celui des 200.000 "contrats de génération" proposés comme alternative par François Hollande. Evalués par l'UMP respectivement à 20 et 40 milliards sur cinq ans, ces deux mesures additionnées coûtent 60 milliards, selon le passage "à la loupe" de l'UMP.
En réalité, François Hollande, qui reprendra certaines mesures du programme du PS mais pas forcément toutes, envisagerait de créer entre 50.000 et 80.000 contrats d’avenir pour les jeunes des quartiers difficiles, en complément des contrats de génération. Le total du coût de ces deux mesures est compris entre 41 et 46,5 milliards d'euros, selon le chiffrage de l'Institut de l'entreprise (en année de croisière). Soit 13,5 milliards de moins que le chiffrage de l'UMP.
L'UMP n'a pas fait dans la dentelle. Les cadres du parti ont relégué aux oubliettes les nuances du programme de François Hollande. Exemple : l'allocation d'autonomie aux étudiants. La mesure est estimée à 60 milliards d'euros selon Terra Nova. Le "think tank", proche du PS, a pris pour hypothèse une allocation pour tous les étudiants sans condition de revenus. Habilement, le parti de la majorité a repris ce chiffre en omettant de préciser que François Hollande n'avait pas retenu cette proposition. Si l'allocation est distribuée sous condition de revenu, la mesure coûterait 1,31 milliards d'euros par an selon l'Institut de l'entreprise (en année de croisière). Soit 6,5 milliards sur 5 ans si l'on extrapole.
Le parti présidentiel ne s'est pas montré plus prudent sur le chiffrage de la réforme des retraites, bien que rien ne soit clairement arrêté au Parti socialiste. Pour l'UMP le retour de l'âge légal à 60 ans et du départ à taux plein à 65 ans coûterait 87 milliards d'euros après cinq ans.
Le parti présidentiel a ajouté des mesures qui ne figurent pas dans le programme du PS ni dans celui de François Hollande. Par exemple, cette idée selon laquelle le PS voudrait "supprimer le quotient familial", affirmation résultant de la confusion avec le quotient conjugal dont la suppression est proposée dans la réforme de l'impôt sur le revenu imaginée par… l'économiste Thomas Piketty, dans son livre "Pour une révolution fiscale".
Jouant le côté "fair play", le rapport fait mine de ne pas avoir compté certaines "dépenses pourtant considérables". Parmi elles, "le renchérissement du coût du crédit lié à la création d'euro-obligations, qui pourrait s'élever à 6 à 8 milliards d'euros par an" (sic). Les stratèges de l'UMP ne prennent ainsi pas en compte la diminution le coût global du crédit induite par l'effet d'échelle que créerait les eurobonds, qui permettrait à la Grèce d'emprunter à des taux abordables sans que ce coût ne soit supporté par les pays bien notés comme la France ou l'Allemagne.
Enfin, nombre d'interventions des ténors de l'UMP lors de la convention de mardi ont eu de quoi surprendre.
Par exemple : l'intervention du ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire qui a déclaré: "La proposition de taxe sur les transactions financières : c'est nous !". Une affirmation qui mérite deux Pinocchios sur l'échelle du mensonge du Nouvel Observateur. Car c'est en fait James Tobin, prix Nobel d'économie, qui a eu l'idée en premier, avant que la proposition ne soit reprise par l'association altermondialiste Attac puis par le Parti socialiste.
Plus surprenante également l'intervention de Thierry Mariani qui a déclaré : "On nous dit : certains, ils (les étrangers, N.D.L.R.) sont là depuis 10 ans, ils doivent pouvoir voter. Mais si vous êtes là depuis 10 ans, ça veut dire que vous auriez pu devenir français au bout de cinq ans et que vous avez fait le choix de ne pas le devenir." Une tentative de distorsion de la réalité qui vaut également deux Pinocchios à Thierry Mariani. Un rapport parlementaire précise que le temps de traitement d'une demande est de 23 mois en moyenne.
Difficile également de ne pas noter la sortie de Nadine Morano, ministre de l'Apprentissage qui a assuré à la salle conquise que le mot "apprentissage" ne figurait pas dans le projet PS. Il y est inscrit sept fois (pages 12, 21, 23, 24 et 35). Un Pinocchio de plus pour la ministre.
Nombre d'autres erreurs/mensonges ont été répertoriées par nos confrères de Libération (Désintox) et du Monde, nous vous invitons à les parcourir.
Vous pouvez nous faire part de vos trouvailles à l'adresse pinocchio@nouvelobs.com.
Gepetto – Le Nouvel Observateur
Le principe des Pinocchios de l'Obs :
Un Pinocchio = Une simple erreur, une imprécision.
Deux Pinocchios = Une erreur manifeste ou un mensonge par omission
Trois Pinocchios = l'erreur grossière, le mensonge prémédité, avec intention de nuire.
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