mardi 18 janvier 2011

L'éditorial de Laurent Joffrin



L’appel de la liberté

Par Laurent Joffrin

Ils ont bonne mine, les gourous du différentialisme, les grands prêtres du choc des civilisations, les savants prophètes de l’identité soi-disant irréductible. Pour eux, aucun doute : dans le monde arabe, la démocratie n’avait aucune chance, les musulmans ne voulaient pas de la liberté, l’islam était imperméable aux valeurs universelles, qui ne sont qu’un luxe réservé aux Occidentaux. Souvenons-nous de Jacques Chirac réécrivant la déclaration de 1789 : «Le premier des droits de l’homme, c’est manger, être soigné, recevoir une éducation et avoir un habitat. De ce point de vue, il faut bien reconnaître que la Tunisie est très en avance.» Sous-entendu : ceux qui réclament des libertés publiques en terre d’islam sont des importuns, des rêveurs ou, pire, des colonialistes déguisés. Et voilà qu’à l’ébahissement des chancelleries occidentales, prenant à contre-pied tous les résignés de la realpolitik, un pays musulman descend dans la rue et chasse un dictateur corrompu et brutal qu’on disait indéracinable. Mieux, dans tout le monde arabe, les cousins de Ben Ali, les Bouteflika, les Moubarak ou les Khadafi, cette Sainte Alliance du nationalisme décati et de la torture dans les caves, commencent à trembler devant leurs peuples et à vérifier dans la fièvre que leurs policiers les soutiennent toujours.

Bien sûr, faute d’avoir prévu le passé, les réalistes se rattrapent en jouant les Cassandre. L’illusion lyrique ne durera pas, pensent-ils, l’anarchie risque de déboucher sur une autre dictature et si, d’aventure, la démocratie s’installe, elle pourrait profiter d’abord aux islamistes qui ont capté l’esprit des couches populaires. L’hypothèse, d’ailleurs, n’est pas invraisemblable :

le vieux leader intégriste tunisien Rached Ghannouchi, retiré à Londres, peut revenir en gloire et lancer avec succès sa formation jusque-là réprimée, Hizb Ennahda (le parti de la renaissance), dans une élection libre.

Mais nous n’en sommes pas là.

Aujourd’hui, le peuple tunisien a démontré que l’appel de la liberté rencontre un écho universel et, que l’on soit Chinois, Iranien ou Arabe, on préfère à toutes les dictatures - celle d’Allah ou celle du Parti - un régime où les droits sont reconnus et où les dirigeants sont soumis au verdict du peuple. Un régime où, comme disait Winston Churchill, «quand on sonne chez vous à 6 heures du matin, vous êtes sûr que c’est le laitier».

Les diplomaties occidentales qui soutiennent sans discontinuer les régimes en place, abandonnant leurs principes pour se trouver du côté du manche, pourraient commencer à le comprendre.Ils ont bonne mine, les gourous du différentialisme, les grands prêtres du choc des civilisations, les savants prophètes de l’identité soi-disant irréductible. Pour eux, aucun doute : dans le monde arabe, la démocratie n’avait aucune chance, les musulmans ne voulaient pas de la liberté, l’islam était imperméable aux valeurs universelles, qui ne sont qu’un luxe réservé aux Occidentaux. Souvenons-nous de Jacques Chirac réécrivant la déclaration de 1789 : «Le premier des droits de l’homme, c’est manger, être soigné, recevoir une éducation et avoir un habitat. De ce point de vue, il faut bien reconnaître que la Tunisie est très en avance.» Sous-entendu : ceux qui réclament des libertés publiques en terre d’islam sont des importuns, des rêveurs ou, pire, des colonialistes déguisés. Et voilà qu’à l’ébahissement des chancelleries occidentales, prenant à contre-pied tous les résignés de la realpolitik, un pays musulman descend dans la rue et chasse un dictateur corrompu et brutal qu’on disait indéracinable. Mieux, dans tout le monde arabe, les cousins de Ben Ali, les Bouteflika, les Moubarak ou les Khadafi, cette Sainte Alliance du nationalisme décati et de la torture dans les caves, commencent à trembler devant leurs peuples et à vérifier dans la fièvre que leurs policiers les soutiennent toujours.

Bien sûr, faute d’avoir prévu le passé, les réalistes se rattrapent en jouant les Cassandre. L’illusion lyrique ne durera pas, pensent-ils, l’anarchie risque de déboucher sur une autre dictature et si, d’aventure, la démocratie s’installe, elle pourrait profiter d’abord aux islamistes qui ont capté l’esprit des couches populaires. L’hypothèse, d’ailleurs, n’est pas invraisemblable :

le vieux leader intégriste tunisien Rached Ghannouchi, retiré à Londres, peut revenir en gloire et lancer avec succès sa formation jusque-là réprimée, Hizb Ennahda (le parti de la renaissance), dans une élection libre.

Mais nous n’en sommes pas là.

Aujourd’hui, le peuple tunisien a démontré que l’appel de la liberté rencontre un écho universel et, que l’on soit Chinois, Iranien ou Arabe, on préfère à toutes les dictatures - celle d’Allah ou celle du Parti - un régime où les droits sont reconnus et où les dirigeants sont soumis au verdict du peuple. Un régime où, comme disait Winston Churchill, «quand on sonne chez vous à 6 heures du matin, vous êtes sûr que c’est le laitier».

Les diplomaties occidentales qui soutiennent sans discontinuer les régimes en place, abandonnant leurs principes pour se trouver du côté du manche, pourraient commencer à le comprendre.

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