Les mensonges des anti-mariage homo
"Il ne faut pas mentir aux enfants", disent les adversaires du mariage pour tous. Louable souci. Est-ce pour cette raison qu'ils ont décidé de mentir aux parents ? Et, par la même occasion, d'abuser l'opinion tout entière ?
Bien sûr, il est parfaitement loisible de s'opposer au projet de loi sur le
mariage
homosexuel présenté par le gouvernement Ayrault. Le changement symbolique
est d'importance, il rompt avec une tradition millénaire et chacun peut
s'interroger à bon droit sur ses conséquences sociales ou psychologiques,
notamment pour les enfants des futurs couples d'homos mariés. Encore faut-il
présenter le texte sous son vrai jour. Il y a d'abord la propagande grossière,
telle que la propage Frigide Barjot, cette militante du strass et du goupillon,
qui vient sur tous les plateaux de télévision clamer qu'on étouffe le débat. Il
n'a jamais été question de remplacer dans le Code civil les mots "père" et
"mère" par les appellations "parent 1" et "parent 2". Le terme n'apparaît
évidemment en rien dans le projet de loi du gouvernement. Pourtant l'expression,
destinée à effrayer les gens de bonne foi, continue à courir. Il y a ensuite
l'intitulé même de la principale association hostile au mariage pour tous :
"Pour l'humanité durable", détournement de l'expression écologiste
"développement durable". Si l'on comprend bien, l'instauration du mariage pour
tous menacerait donc non une institution mais le devenir de l'humanité tout
entière. L'homosexualité reconnue dans ses droits fragiliserait le genre humain,
ni plus ni moins ! Aucune homophobie, bien sûr, dans cette accusation
outrancière...
Apolitique ?
La lecture du manifeste de l'association, signé par Frigide Barjot, est éclairante. On y trouve, par exemple, l'exigence du "respect de la vie de la conception à la mort naturelle", c'est-à-dire la condamnation de la loi Veil sur l'interruption de grossesse comme celle de la loi Leonetti sur la fin de vie. On y trouve aussi l'affirmation selon laquelle "l'humanité durable" repose sur le respect "des fondements de notre civilisation judéo-chrétienne" ; autrement dit, "l'humanité durable" n'est pas seulement menacée par les homosexuels mais aussi par les athées et les musulmans. En dépit de cette profession de foi clarissime, Frigide Barjot et ses épigones continuent d'affirmer que leur mouvement, soutenu essentiellement par l'Eglise catholique et l'UMP, est apolitique et non confessionnel ! Non confessionnel, en effet, c'est-à-dire plus rigide que la version la plus rigide de la doctrine catholique. Apolitique, en effet, c'est-à-dire ni de gauche... ni de gauche.Un bouleversement du mariage tout entier ?
Venons-en au fond. La réforme est symboliquement importante, chacun en est d'accord. Mais les opposants vont beaucoup plus loin. Il s'agit, selon leurs propres termes, d'un "bouleversement anthropologique historique" éminemment néfaste. Sous cette bannière, Frigide Barjot tente de faire croire à l'opinion que c'est le mariage tout entier qui est jeté bas. C'est là que réside le mensonge principal. Quiconque lira le projet de bonne foi constatera que les principes régissant le mariage, en dehors de l'admission des homosexuels, ne sont en rien modifiés. Il s'agit des mêmes dispositions, du même esprit, de la même fonction sociale. On fait tout un plat du remplacement des mots "père et mère" par le mot "parents". Or celui-ci désigne évidemment, pour les couples hétéros, c'est-à-dire pour l'immense majorité des parents... le père et la mère. Le changement ne concerne que les homosexuels, qui seront admis à la qualité de parents mariés, droit qui leur est jusqu'à présent dénié. Pour les autres, rien ne change.On remarquera que dans son article le plus connu (art. 212) - "Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance" - le Code actuel emploie un vocable collectif, "époux", pour désigner le mari et la femme. Citons l'article suivant (213) : "Les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille, ils pourvoient à l'éducation des enfants et préparent leur avenir". Cette fois le mot "époux" désigne le père et la mère. En quoi cet usage introduit-il une "indifférenciation des sexes" ou une "négation des rôles respectifs du père et de la mère" ? En rien, évidemment. Alors pourquoi faire croire que l'introduction du mot "parents" pour remplacer "père et mère" bouleverse le mariage hétérosexuel ? La réforme ne modifie pas le droit du mariage pour les hétéros. Elle se contente de l'appliquer aussi aux homosexuels. Ni plus ni moins. Une fois la réforme entrée en vigueur, les mariages continueront à être célébrés exactement comme aujourd'hui pour les hétérosexuels, c'est-à-dire pour l'immense majorité des époux, comme en Espagne ou au Portugal, pays catholiques qui ont manifestement survécu à cet ébranlement "anthropologique".
Le fond de l'affaire ? les textes religieux
Une fois de temps en temps se présentera à la mairie un couple d'homosexuels. Ils écouteront le maire lire les mêmes articles du Code en présence de leur famille et de leurs amis qui applaudiront en souriant, pour se disperser ensuite dans des automobiles dont le klaxon, il faut le craindre, retentira dans les rues comme celui des hétéros. Voilà la catastrophe dont nous sommes menacés.La vérité, c'est que le mariage pour tous, mesure d'égalité républicaine, heurte les croyances des religieux, dont les livres sacrés condamnent l'homosexualité. Voilà le fond de l'affaire. S'ils sont prêts à tolérer les homosexuels par miséricorde, ils considèrent que l'extension du mariage à cette catégorie pécheresse pollue une institution d'origine sacrée. Cette motivation a seulement été camouflée sous une rhétorique creuse et horrifique : tel est le piège tendu par Frigide Barjot et par la bigoterie branchée qui sert de paravent au dogmatisme religieux.
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